dimanche 2 septembre 2012

Ce que je vois en étant vu




Ce que je vois en étant vu, n’est pas ce que je crois mais ce que j’entends. Je n’ai pas peur de perdre mes enfants, on perd un instant pour gagner à un autre. Parfois, quand une vague est trop haute, il faut apprendre à plonger pour la traverser. Parfois dans un combat, il faut savoir fuir, et c’est une manière de gagner. De même mes enfants, j’ai tant de secrets que je ne crains plus qu’on les découvre. Pas plus qu’on ne me les arrache. On meurt du désir de posséder, le désir de posséder est cela même qui fait perdre.
J’ai choisi il y a bien longtemps le chemin de la transparence.  

Vivre en se sachant vu. C’est une étrange condition que de vouloir habiter une maison de verre, en se disant qu’après tout, qu’y a-t-il à cacher pour lequel il n’y ait pas de témoin. Quand on sait que le témoignage est acquis, le secret n’a plus de sens. Evidemment ce n’est pas une politique pour diriger les états, les états aiment le secret, mais c’est une bonne politique pour diriger les nations, les nations aiment la transparence, parce que les nations se sont dans le fond un seul homme et un homme doit savoir ce qu’il fait et avoir aussi peu de secrets qu’il se peut sur lui-même.
Alors, quand on me dit un tel est ton ennemi et un autre ton ami, je sais qu’il y a du plausible mais je crois plus surement qu’un tel à un moment fut mon ami, à un autre mon ennemi à un autre mon ami, et que cela est dans le fond la condition humaine, le savoir c’est vous prémunir, mais c’est aussi une manière de sauver l’amitié.  L’ennemi de l’homme mes enfants, c’est d’abord soi même, et soi même mes enfants vous en êtes plus conscients que moi c’est beaucoup de monde, on n’est pas le même maintenant, dans quelques minutes, il y a quelques minutes.
J’ai toujours pensé que celui qui ne voulait pas être volé devait garder ses portes grandes ouvertes, ne serait ce que parce que quand la porte d’une maison est grande ouverte personne ne sait en quelle compagnie il va se retrouver s’il entre. Je ne sais pas à quoi vous pensez quand vous dites cela aussi il le lui a dit, j’ai dit tant de choses avec la volonté que tout le monde s’il ne comprend m’aide à comprendre. Je comprends aussi mes enfants quand je dis. Je comprends aussi mes enfants que dans le fond un homme ne parle qu’à lui-même même quand il prétend parler aux autres,  de même quand vous allez à une épicerie c’est en partie à vous-même que vous achetez les produits que vous consommez, le fait qu’un homme ne soit en rapport dans le fond qu’avec lui-même quoiqu’il fasse, à défaut cette seule idée, est d’abord le fruit d’une conscience de la terrible responsabilité de l’humain qui dans le fond ne se fait du bien qu’à lui-même de même qu’il ne se fait du tort qu’à lui-même. Moi-même je n’écris que pour m’entendre.  Le fond de ma tristesse est que j’ai choisi de porter au plus loin la conscience de ma propre responsabilité, jusqu’à l’irresponsabilité. Nu n’est maître de son destin.

C’est pourquoi mes enfants je souris de vos inquiétudes tout comme je les observe tout comme je m’en réjouis, tout comme je les guette, tout autant que de vos remarques et de vos questions. Je sais que le spectacle que je vous offre ainsi est bien supérieur à celui que peut vous offrir un match de foot ou un jeu vidéo, mais je mise sur ma méconnaissance de l’avenir pour survivre. Les hasards du destin, ses contrecoups, ses tours et ses détours sont le pari que je fais pour que mes pertes ne soient jamais absolues tout comme mes gains ne doivent jamais être excessifs. Et il y a l’égo, ce terrible ego qui vous dit en permanence que vous avez tout compris et à d’autres moments que vous n’avez rien compris. J’en prends terriblement conscience quand je m’adresse à quelqu’un, de tous ces mots lourds de sens qui font passe pour un homme éminemment sensé et réfléchi, je me méfie comme de la peste, parce que je sais qu’il m’est très facile de me faire passer pour un homme intelligent et cultivé quand je sais tout autant que ni l’intelligence ni la culture ne pèsent dans la balance des actes.
Mon véritable secret mes enfants est celui de toute ma dynastie à travers les temps, c’est l’amour de l’amour. J’aime aimer quand je sais pertinemment que l’amour est un mot vain, mais ce sentiment est cela même qui permet de ne jamais avoir honte ni de mon état ni de ma condition ni de l’état et de la condition des autres. Les êtres humains sont tous faibles et démunis st leur seule richesse est la compassion. La compassion dresse en vous un empire, et celui qui est prêt à se sacrifier pour un autre peut être assuré qu’au moins un autre sera prêt à se sacrifier pour lui. C’est la solidarité des démunis, la seule véritable munition dont nous disposions dans un monde qui restera toujours à pacifier et qui ne connaîtra jamais la paix.
Il vient un temps mes enfants où il faut être prêt à réunir les choses éparses comme il y a un temps pour ne pas les réunir. Se dévoiler au grand jour c’est périr, ne pas se montrer c’est trop cacher.  J’ai choisi de prendre mon temps. Je sais et je demande et je prie pour que le destin ne réunisse que ce qu’il y a de mieux comme on dispose une multitude d’ingrédients sur la table tout en sachant que les meilleurs plats sont ceux qui en exigent le moins. De même on peut vouloir tout planifier pour réussir une pièce montée et le faire en quelques heures. ,ais quand la pièce que vous voulez monter est une histoire qui doit traverser les siècles, comment voulez vous planifier ce qui va vous survivre et vous enterrer. Il faut semer là et là et là et encore là en sachant qu’ici il ne poussera rien de bon que là il y aura autre chose de meilleur et ainsi de suite.

 Une telle histoire seul le destin peut la porter, encore faut-il qu’elle lui plaise, ou qu’elle se rapproche au plus de celle qu’il a voulu nous faire raconter. Une partie d’échec sur quelques heures, ce n’est pas une partie d’échec sur plusieurs années, encore moins une partie d’échec dont on espère qu’elle vous ouvrira les portes de l’éternité. Les anciens grecs jouaient à ce jeu là, c’était le jeu des héros : des hommes qui aimaient la mort, non pour elle-même, personne n’aime mourir, mais parce qu’ils savaient que c’est à ce moment seulement que la véritable histoire se raconte.  Je pense à l’histoire d’Achille par exemple. Celui là est mort en héros et son nom traverse les siècles. Ulysse qui fut un homme rusé et un éternel fuyard,  lui aussi a traversé les siècles alors qu’il est mort dans son lit. De même les petits enfants du prophète : l’un est mort en homme comblé à Médine, l’autre au cours d’un combat interminable et tout aussi comblé. Aucune option n’exclut l’autre mes enfants, un homme qui élève ses enfants a autant de courage qu’un guerrier sur un champ de bataille, le tout est d’avoir conscience de son irresponsabilité.

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