A combien se
vendent les cerveaux des enfants durant leur période d’apprentissage scolaire ?
la question semble curieuse mais je vais m’expliquer. Je m'interroge sur les contenus des programmes de
formation sur lesquels se basent les enseignants pour établir leurs cours. je ne
suis pas sur que les éducateurs mesurent l'étendue de ce qu'ils font même s’ils en constatent irrémédiablement les
effets sur le développement et le comportement des jeunes adolescent et des jeunes adultes.
Une classe c'est
véritablement du temps de cerveau disponible. une trentaine par classe en
moyenne auxquels on inculque des savoirs et des valeurs, un cousin disait des
cerveaux que l'on flashe comme on flashe les mémoires des puces d'ordinateurs
et de téléphone… l'idée est un peu restrictive et anthropomorphique mais elle
veut bien dire ce qu'elle veut dire. L'essentiel des automatismes sociaux et
des savoirs- acquis le sont dans l'espace éducatif autant que dans l'espace
familial : savoir se mettre en rang, savoir danser et jouer ensemble et
par groupes, en plus de savoir compter lire et raisonner. Sans compter
l'acquisition des références culturelles communes qui sont propres à chaque
pays et à chaque espace civilisationnel.
C’est pourquoi
les enjeux sont très important quand au choix des méthodes et des contenus éducatifs
au niveau des échelons supérieurs des bureaucraties éducatives (ministères et
directions de l’enseignement et de la formation notamment). Les enjeux sont d’ailleurs aussi bien éducatifs, financiers que politiques.
Le fait est que
le constat de base qui est fait est toujours le même : « L'école
produit des jeunes qui ont acquis des connaissances pendant plusieurs années,
mais qui sont incapables d'en tirer parti dans la vie de tous les jours »,
soit l’inadéquation entre les savoirs transmis dans les infrastructures éducatives et les
besoins réels des sociétés. Il y a quelques
années, j’ai suivi cette affaire dans les journaux, ils ont introduit au Maroc et à grand
frais, dans le cadre d’un plan d’urgence du ministère, une nouvelle méthode
pédagogique, dite pédagogie de l’intégration. Les technocrates du ministère, ( L'Equipe
du Centre National des Innovations Pédagogiques et de l'Expérimentation du
Ministère de l'Education Nationale) ont fait appel à une expertise du Bureau international d'éducation (BIE), un institut
de l’UNESCO spécialisé dans les contenus, les méthodes et les structures de
l’éducation dont la mission principale
est de « contribuer à atteindre une éducation de qualité pour tous (EPT) »
au travers de réseaux visant à «partager
l’expertise en matière de développement du curriculum dans toutes les régions
du monde. » Cette expertise, qui a coûté une fortune au pays, fut initiée et suivie au Maroc par un
consultant « Conseiller scientifique de la réforme éducative de
l'enseignement primaire et secondaire collégial, , 2008-2010 » ainsi qu' une trentaine
d’experts internationaux.
L’expérimentation
(avec comité de pilotage, chargés de suivis et tutti quanti) a été programmée pour
trois ans et n’a pas été reconduite suite à l’opposition et aux réticences d’une
grande partie du corps enseignant. Il faut voir au passage que des solutions
pédagogiques il y en a un paquet :
pédagogie du projet, pédagogie par situation-problème, pédagogie coopérative, pédagogie différenciée, pédagogie de la maîtrise, pédagogie de contrat, pédagogie de la faute et de l'erreur, pédagogie
de l'activité, pédagogie du modèle, pédagogies actives... etc. la pédagogie
intégrative qui n’est jamais qu’une pierre de plus ajoutée à l’édifice théorique
des sciences pédagogiques n’est pas
forcément une révolution ni un miracle. Mais elle a un coût.
C’est un enseignant qui me l’a expliqué : Il y a non seulement les émoluments des conseillers et des experts internationaux, mais aussi les salaires de centaines de formateurs en nouvelle pédagogie ainsi que les frais de détachement de milliers d’enseignants et d’enseignantes rémunérés, à juste titre parfois pour participer aux stages de formations visant à les initier aux nouvelles méthodes pédagogiques. D’après l’enseignant qui m’a évoqué l’affaire (c’était dans les environs de Marrakech il y a quelques mois) c’est pour ainsi dire toute une pyramide de pique-assiettes qui sont ainsi invités à participer à une véritable gabegie nationale et budgétaire. On peut parler de gabegie parce qu’au bout de trois ans, la nouvelle pédagogie n’ayant pas donné les résultats escomptés, le programme a été suspendu. En attendant probablement une nouvelle réforme initiée par de nouveaux technocrates …
C’est un enseignant qui me l’a expliqué : Il y a non seulement les émoluments des conseillers et des experts internationaux, mais aussi les salaires de centaines de formateurs en nouvelle pédagogie ainsi que les frais de détachement de milliers d’enseignants et d’enseignantes rémunérés, à juste titre parfois pour participer aux stages de formations visant à les initier aux nouvelles méthodes pédagogiques. D’après l’enseignant qui m’a évoqué l’affaire (c’était dans les environs de Marrakech il y a quelques mois) c’est pour ainsi dire toute une pyramide de pique-assiettes qui sont ainsi invités à participer à une véritable gabegie nationale et budgétaire. On peut parler de gabegie parce qu’au bout de trois ans, la nouvelle pédagogie n’ayant pas donné les résultats escomptés, le programme a été suspendu. En attendant probablement une nouvelle réforme initiée par de nouveaux technocrates …
S’agissant du
coût de ces prétendues réformes il est en revanche très élevé. Aussi bien en
argent qu’en heures de travail. Mais il y a aussi d’autres points. D’abord le phénomène
n’est pas limité au Maroc ni aux pays du tiers monde. En France notamment, on reforme et abroge périodiquement, au fil des
changement de gouvernement et des concertations avec les syndicats d’enseignants,
des dispositifs mis en place par les équipes précédentes pour les remplacer par
d’autres ; tout en faisant malgré tout le constat d’une détérioration régulière, à l’image de la fonte d’un
iceberg, du niveau et de la qualité des rendements pédagogiques. Cela va de la
réécriture régulière des programmes de l'école primaire et du collège jusqu’à
la réévaluation des rythmes scolaires comme c’est le cas lorsqu’on parle de mise en place de la semaine de neuf
demi-journées, etc. . C’est donc un
phénomène général dont les incidences sont mesurées mais pour lesquelles il n’y
a pas de solution miracle, mais un tâtonnement permanent et couteux. Mais il n’y
a pas que le coût et ce n’est pas seulement une question de budget et de
moyens.
Le fait est que l’appareil
éducatif responsable de la formation de générations d’enfants de par le monde, se
comporte comme un laboratoire d’expérimentations scientifiques chargé de louer
des cobayes ou pour être plus précis de louer du temps de cerveaux d’enfants. Je
ne parle pas bien sur des individus et de leurs intentions toujours louables
dans l‘absolu mais de l’épreuve de réalité. Quand on expérimente durant
deux, trois ou cinq ans un programme de formation et que l’on en change,
puis change et rechange à nouveau; à l’échelle des générations et des pays, c’est comme si l’on changeait de chemises tous
les jours. Dans les faits ce sont essentiellement des transferts économiques
qui sont cautionnés. Tel fournisseur de contenu est remplacé par tel autre
fournisseur de contenus avant qu’un autre ne vienne à nouveau prendre une place
qui sera de nouveau vacante au bout de quelques mois ou années. Il en est d’ailleurs
de même des livres de classes qui de nos jours sont refondus presque de fond en
comble au bout de quelques années alors que par le passé (pas si ancien) il
fallait une génération (quinze à vingt ans voire plus) avant que l’on ne change
de support d’enseignement.
Pendant la période où tel ou tel programme de formation est déployé ce sont ainsi des générations d’enfants, des esprits éminemment malléables (le cerveau d’un enfant est comme une éponge disait je ne sais plus quel savant) qui sont ainsi en quelques sorte loués ou vendus à tel ou tel scientifique le temps d’une expérience toujours à prétention réformatrice. Les ministres n’ayant pas forcément le temps de penser à tout mais qui doivent quand même proposer des projets novateurs, ce sont en conséquence des think thank sous la forme d’institutions pédagogiques nationales ou internationales qui se chargent de fournir le capital d’idées et de méthodes pédagogiques nécessaire pour alimenter les services et directions éducatives du léviathan (une métaphore qui désigne l'État chez Thomas Hobbes). Si ces organisations fournissent ,donc vendent, des contenus, qu’achètent-elles en retour ? ce qu’elles achètent ce sont ces milliers voire millions d’esprits qui serviront pendant une durée plus ou moins courte de supports pour les idées produites dans les laboratoires de la pensée pédagogique.
La réponse à la question posée en tête de ces lignes n’est donc pas si difficile ni complexe : A combien se vendent les cerveaux des enfants durant leur période d’apprentissage scolaire ? pour quelques centaines de milliers d’euros et pendant trois ans un centre de recherche peut s'offrir des milliers de cerveaux d’élèves, le temps d’une expérimentation abandonnée au bout de la troisième année. Pas si cher finalement.
Pendant la période où tel ou tel programme de formation est déployé ce sont ainsi des générations d’enfants, des esprits éminemment malléables (le cerveau d’un enfant est comme une éponge disait je ne sais plus quel savant) qui sont ainsi en quelques sorte loués ou vendus à tel ou tel scientifique le temps d’une expérience toujours à prétention réformatrice. Les ministres n’ayant pas forcément le temps de penser à tout mais qui doivent quand même proposer des projets novateurs, ce sont en conséquence des think thank sous la forme d’institutions pédagogiques nationales ou internationales qui se chargent de fournir le capital d’idées et de méthodes pédagogiques nécessaire pour alimenter les services et directions éducatives du léviathan (une métaphore qui désigne l'État chez Thomas Hobbes). Si ces organisations fournissent ,donc vendent, des contenus, qu’achètent-elles en retour ? ce qu’elles achètent ce sont ces milliers voire millions d’esprits qui serviront pendant une durée plus ou moins courte de supports pour les idées produites dans les laboratoires de la pensée pédagogique.
La réponse à la question posée en tête de ces lignes n’est donc pas si difficile ni complexe : A combien se vendent les cerveaux des enfants durant leur période d’apprentissage scolaire ? pour quelques centaines de milliers d’euros et pendant trois ans un centre de recherche peut s'offrir des milliers de cerveaux d’élèves, le temps d’une expérimentation abandonnée au bout de la troisième année. Pas si cher finalement.